1Principe cosmologique¶
Figure 1:Distribution des galaxies compilée par l’étude eBOSS. Chaque point de ce diagramme « circulaire » est une galaxie, codée par type : vert pour les galaxies proches, magenta et rouge pour les vieilles galaxies rouges, bleu pour les jeunes galaxies, jaune et blanc pour les quasars. Crédit : A. Raichoor (EPFL) / A. Ross (Ohio State Univ.) / Collaboration SDSS

Figure 2:Carte de température du fond diffus cosmologique micro-onde (CMB) observée par le satellite Planck. L’écart relatif observé entre la température des points chauds (rouges) ou froids (bleus) par rapport à la moyenne est de l’ordre de .
Pour être en mesure de construire un modèle de l’Univers, c’est-à-dire une construction théorique capable de décrire le contenu de l’Univers et son évolution, il faut parvenir à résoudre l’équation d’Einstein de la Relativité Générale. Cependant, jusqu’à quel niveau de détail est-il nécessaire d’aller pour le décrire suffisamment bien aux grandes échelles ? On se doute que paramétrer l’équation d’Einstein jusqu’à inclure l’échelle du système solaire est à la fois illusoire et non nécessaire. Quelle est la structure de l’Univers aux plus grandes échelles ? Ici la nature nous fait un beau cadeau, qui va simplifier considérablement l’écriture d’un modèle cosmologique à partir des équations de la Relativité Générale.
l’Univers est homogène : la métrique ne dépend donc pas de la position d’un observateur dans l’espace, donc aucune position n’est particulière dans l’Univers. Cette affirmation, issue du principe Copernicien, n’est que statistiquement vraie car localement on observe bien que la matière a formé des grumeaux (planètes, étoiles, galaxies,...) au milieu de larges vides. Cependant l’observation de l’Univers à grande échelle montre que l’Univers est bien globalement homogène à des échelles plus grandes que Mpc[1] (voir Figure 1 et par exemple Scrimgeour et al. (2012) pour une mesure de l’homogénéité de l’Univers par comptage de galaxies).
l’Univers est isotrope: aucune direction n’est privilégiée. Ainsi, des observations effectuées dans deux directions différentes du ciel sont équivalentes. Ceci est bien vérifié par l’observation du fond diffus cosmologique micro-onde (CMB) dont la température est mesurée identique à dans toutes les directions de l’espace Mather et al., 1999. Seules des fluctuations de température de l’ordre de sont détectées sur cette image de l’Univers jeune (voir Figure 2 et par exemple The Planck Collaboration (2013) pour une vérification du principe d’isotropie utilisant l’effet Sunyaev-Zeldovich).
Ignorer complètement ce qui se passe à des échelles “insuffisamment” grandes est la première étape pour construire une solution cosmologique à la Relativité Générale. Muni de ces faits observationnels, nous imposerons l’homogénéité et l’isotropie à la métrique et à la distribution de la matière (c’est-à-dire au tenseur énergie-impulsion).
A propos de l’homogénéité de l’Univers
Avant de présenter cette solution cosmologique, il est intéressant de se demander pourquoi le principe cosmologique devrait s’appliquer. Alors que la gravité, la force dominante qui façonne les structures à grande échelle de l’univers, tend à détruire l’homogénéité (une région légèrement sur-dense dans un univers homogène attirera la matière et deviendra de plus en plus sur-dense), il faut plus de temps pour que la matière aux grandes échelles forme des grumeaux. Comme les grandes échelles semblent plus homogènes dans les observations, on peut supposer que l’univers était beaucoup plus homogène dans le passé à toutes les échelles et qu’il le devient de moins en moins sous l’action de la gravité. Mais pourquoi était-il homogène à l’origine ? Une réponse logique est qu’une interaction autre que la gravité y a contribué (comme, par exemple, la pression dans un gaz parfait). Cependant, la Relativité Générale stipule qu’aucune interaction ne peut se propager plus vite que la vitesse de la lumière. Nous verrons que dans une théorie où l’évolution de l’univers découle d’un Big Bang initial, cela crée une difficulté potentielle : l’homogénéisation ne devrait être possible que jusqu’à des échelles égales à la distance parcourue par un photon entre le Big Bang et aujourd’hui.
2Univers de symétrie maximale¶
Étant donné le principe cosmologique, on cherche à déterminer la forme que doit prendre la métrique d’un Univers de symétrie maximale, c’est-à-dire un Univers dont les propriétés sont invariantes par rotation et translation Weinberg, 1972[p. 379].
Métrique d’un Univers isotrope¶
Le diagramme d’espace-temps d’un Univers homogène et isotrope possède un axe temporel orthogonal aux vecteurs de base spatiaux à cause de l’isotropie de l’Univers. Chaque hypersurface à un instant est alors un Univers de densité homogène.
Tout d’abord, si l’univers est isotrope, on peut vérifier que les composantes croisées et sont nulles. Si tel n’était pas le cas, on aurait une direction privilégiée dans l’univers. On peut s’en convaincre en remarquant que ces composantes sont non nulles si on réalise une transformation de Lorentz (6)-(7), justement lorsqu’on prend un référentiel en translation uniforme par rapport à un autre, donc se déplaçant dans une direction choisie.
Autre façon de se convaincre, prenons un espace-temps 2D. Si la métrique a la forme :
alors l’équation des trajectoires de type lumière est :
On peut alors vérifier, en résolvant l’équation du second degré en que si , deux opposés donnent deux valeurs différentes de positif. C’est-à-dire qu’un observateur recevra à des moments différents les impulsions lumineuses émises simultanément par deux sources situées à la même distance dans des directions opposées . Cela rompt évidemment l’isotropie. Les termes et de la métrique sont donc nuls. Cela signifie que le vecteur temporel est orthogonal aux vecteurs de base spatiaux .
De plus, si l’Univers est homogène alors la composante ne peut dépendre que du temps , de sorte que le battement des horloges ne dépende pas de la position dans l’espace. Donc Weinberg, 1972[p. 403]. Si nous appelons le paramètre le temps, nous voyons que nous avons un temps universel en tout point de l’espace, appelé temps cosmologique. Comme l’univers est homogène, alors cela signifie qu’à chaque date on peut associer une densité de matière ou d’énergie identique pour tous les observateurs, donc qu’avec un densimètre on peut construire une horloge commune à tous les observateurs présents dans l’Univers.
En combinant les deux résultats précédents, l’intervalle espace-temps peut être écrit sous la forme suivante :
où est un vecteur élémentaire spatial. Il est alors possible de fixer à -1 quitte à redéfinir la variable temps[2]. La métrique prend donc la forme :
où est la métrique spatiale, qui peut dépendre du temps et de la position, et comportant 6 composantes indépendantes inconnues (une métrique est un tenseur symétrique).
Géométrie d’un Univers maximallement symétrique¶
Trouvons maintenant une forme explicite pour . Un Univers de symétrie maximale (homogène et isotrope) doit posséder une courbure constante spatialement. Cela se comprend assez intuitivement mais aussi se démontre en Relativité Générale Weinberg, 1972 [p. 381]. Notons le rayon de courbure associé, et soit un vecteur position dans l’espace 3D :
Tout d’abord, si cet espace possède une courbure nulle, alors la distance élémentaire s’écrit simplement :
Travaillons maintenant sur le cas où la courbure est non nulle. Pour décrire la courbure d’une surface avec des notions de géométries habituelles, étudions-la dans un espace avec une dimension supplémentaire. Plaçons cet espace 3D non euclidien (courbé) dans un espace 4D de métrique avec des coordonnées cartésiennes . Posons la distance euclidienne dans le sous-espace 3D. On a alors deux hyper-surfaces 3D possibles, de courbure de Gauss constante Baumann, 2022 :
- une 3-sphère de rayon si elle est plongée dans un espace Euclidien 4D :
- une 3-hyperboloïde de courbure si elle est plongée dans un espace Lorentzien 4D :
Espace sphérique 2D de rayon représenté dans un espace euclidien 3D . À une coordonnée , on souhaite exprimé la longueur d’un vecteur élémentaire tangent à la sphère dans les deux espaces.
Les deux derniers cas de courbures strictement positive ou négative sont donc définis par l’équation de contrainte :
où on autorise ici le rayon à dépendre du temps, car a priori peut dépendre du temps.
Notion de courbure
Si ces raisonnements vous troublent, rappelez-vous que c’est comme décrire la courbure d’un cercle de rayon . Un cercle est un objet à une dimension car il n’y a qu’une seule direction de déplacement sur cet objet, paramétré par un angle θ par exemple). Mais il peut aussi se décrire dans un plan 2D, avec deux coordonnées et liées par l’équation :
De même, une sphère (objet à deux dimensions) peut être étudiée dans un espace avec une troisième dimension, donc trois coordonnées liées par l’équation :
La notion de courbure peut se calculer soit intrinsèquement, soit à l’aide d’une dimension supplémentaire. Intrinsèquement, un être vivant sur un cercle peut mesurer sa courbure en mesurant le chemin parcouru lors d’un tour : il en déduira que la courbure de son cercle est avec déduit du périmètre parcouru . S’il est capable de sortir du cercle et de voyager dans une seconde dimension, il pourra observer son cercle depuis l’extérieur et mesurer aussi la courbure de son Univers.
La distance infinitésimale entre deux points de l’hypersurface définie dans l’espace 3D courbe de métrique doit être identique à celle mesurée dans l’espace 4D, donc :
où le cas correspond à une géométrie sphérique, le cas à une géométrie hyperbolique Weinberg, 1972 [p. 390-391].
Or, l’équation de contrainte (9) lie et donc on peut remplacer par une expression fonction de et (donc sans la quatrième dimension). La différentiation de l’équation (9) donne la relation
donc, en injectant de nouveau l’équation (9), on obtient :
La distance infinitésimale entre 2 points de l’espace 3D non euclidien de courbure non nulle constante est alors :
A cette étape, nous pouvons maintenant combiner le résultat obtenu pour les deux courbures non nulles avec le cas euclidien en introduisant le paramètre de courbure :
On a ainsi pour les trois géométries possibles d’un Univers maximallement symétrique :
où dans le cas d’un espace plat on aurait .
Enfin, introduisons la variable rééchelonnée , et nous obtenons une nouvelle expression :
La métrique de Friedmann-Lemaître-Robertson-Walker décrivant un Univers homogène et isotrope s’écrit finalement :
La métrique de Friedmann-Lemaître-Robertson-Walker (FLRW) constitue le cadre de base du modèle cosmologique standard. Les hypothèses d’homogénéité et d’isotropie ont directement conduit à une métrique décrivant un univers avec seulement trois géométries possibles (plat, 3-sphère, 3-hyperboloid) et un facteur d’échelle affectant les distances. Notez que, grâce à l’imposition des symétries d’homogénéité et d’isotropie, nous avons réduit l’écriture de la métrique (qui est un tenseur symétrique) constituée a priori de 10 composantes indépendantes inconnues à un tenseur possédant une seule fonction inconnue .
Il est important de comprendre la signification physique du facteur d’expansion . Tout d’abord, d’après l’équation (17), ce facteur relie la distance physique et la distance de coordonnées σ par . Une particule dont les coordonnées spatiales sont fixes verra sa distance physique avec un observateur en augmenter (ou diminuer) avec le temps. Cette variation de la distance se réalise à la vitesse apparente :
car si la particule n’a pas de mouvement propre, avec le point exprimant une dérivée par rapport au temps . On obtient donc une relation directe entre la distance à un observateur central et la vitesse apparente : c’est la loi de Hubble. Le taux d’éloignement est donné par le paramètre de Hubble, qui quantifie la vitesse de variation du facteur d’échelle :
Pour un univers sphérique, le facteur d’échelle représente également son rayon de courbure. Un univers sphérique dynamique correspond donc à un univers possédant un rayon de courbure variable dans le temps. Un espace plat ne possède pas d’échelle caractéristique, la valeur de n’est donc pas une observable physique. La quantité ayant un sens physique pour un tel univers est le paramètre de Hubble .
Dans le but d’alléger les notations, la dépendance temporelle des paramètres ne sera pas toujours explicitée, de sorte que . On désignera les paramètres évalués au temps présent par l’indice ou l’exposant 0 si bien que . Dans la suite, nous travaillerons dans le système où n’est pas fixé à 1.
Table 1:Représentation des équivalents à deux dimensions des trois espaces solution des principes cosmologiques: la 2-sphère, le plan, le 2-hyperboloïde.
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3Coordonnées comobiles¶
Il est important de noter que tous les observateurs ne voient pas l’Univers comme isotrope, mais seulement les observateurs dits comobiles, qui sont localement au repos avec l’essentiel de la matière dans leur voisinage. Nous, par exemple, ne sommes pas des observateurs mobiles : lorsque nous observons la température du CMB, la première caractéristique que nous voyons est un grand dipôle de température (plus chaud d’un côté, plus froid du côté opposé), qui est le résultat du mouvement particulier de notre système solaire dans la galaxie, et de notre galaxie dans l’Univers (et de notre groupe de galaxies). Si on retranche ce mouvement propre par rapport au référentiel du CMB, alors cela ferait de nous des observateurs comobiles. Ainsi, on peut définir un système de coordonnées associés à des observateurs sans mouvements propres, dont les distances propres relatives n’augmentent qu’avec le facteur d’échelle Weinberg, 1972[p. 409].
Dans la métrique FLRW où l’expansion de l’Univers est factorisée par un facteur d’échelle , les coordonnées spatiales sont appelées coordonnées comobiles. Il existe une grande liberté dans le choix des coordonnées comobiles.
Coordonnées sphériques¶
On privilégie souvent les coordonnées sphériques avec l’observateur (nous-mêmes) à l’origine, telles que :
Après des calculs simples mais longs (voir notebook et ici), dans les trois cas de courbures la métrique FLRW s’écrit :
Courbure et finitude de l’Univers
Pour la 3-sphère, 3-hyperboloïde et le plan, la courbure de ces surfaces est Weinberg, 1972[p. 412]:
La 3-hyperboloïde et le plan sont d’extension infinie. En revanche, la 3-sphère est d’extension finie mais reste non bornée : une particule ne rencontrera jamais de bord mais on peut définir un volume :
et un périmètre (longueur d’un méridien) :
Coordonnées cartésiennes¶
Le cas de l’univers plat simplifie beaucoup les calculs qui suivront. Étant donné que l’hypothèse d’une courbure nulle est compatible avec les contraintes de plus en plus fortes des observations cosmologiques, nous concentrerons désormais nos développements analytiques sur l’univers plat, en mentionnant des résultats pour le cas général lorsque cela est nécessaire. Dans le cas de courbure nulle, il peut être pratique d’utiliser les coordonnées comobiles cartésiennes , telles que :
La métrique FLRW s’écrit dans un univers plat :
4Géodésiques dans la métrique FLRW¶
Quelle est la trajectoire d’une particule en chute libre dans une métrique FLRW ? D’après la Relativité Générale, nous savons qu’une telle particule se déplace le long d’une géodésique dont l’équation est la suivante :
où est un paramètre quelconque décrivant la position le long de la géodésique (le temps propre par exemple). Une autre forme de l’équation des géodésiques va ici nous aider, obtenue à partir de la définition de la dérivée covariante (28) :
Définissons la quadri-vitesse le long d’une ligne d’Univers par . Alors :
Démonstration
L’égalité précédente est démontrée dans Hobson et al. (2006)[p. 81]. En voici l’essentiel :
car la métrique est un tenseur symétrique donc .
A partir de cette forme de l’équation des géodésiques (voir Hobson et al., 2006[p. 81] pour une démonstration), calculons la forme que doit prendre le vecteur contravariant dans une métrique FLRW pour une particule en chute libre.
Commençons par le cas et utilisons les coordonnées sphériques . Comme la métrique FLRW ne dépend pas de ϕ, alors :
donc est une constante du mouvement. Or, on a par ailleurs :
dont l’expression s’annule à l’origine en , là nous observons. Comme la composante est constante alors elle est identiquement nulle le long de la trajectoire. On en déduit :
Passons au cas . La seule composante de la métrique dépendant de θ est mais est identiquement nul donc :
Or de même on a par ailleurs :
qui s’annule en donc est nul tout le long de la trajectoire. On en déduit :
5Le décalage spectral, ou redshift¶
Figure 6:Notations pour le calcul du redshift et des distances cosmologiques en coordonnées comobiles.
Pour mesurer l’histoire de l’expansion de l’Univers, il faut avoir accès au paramètre d’échelle . Ceci est possible par la mesure du décalage spectral de la lumière venant de sources distantes. Dans la métrique FLRW, plaçons-nous par convention au centre (), et considérons un objet situé aux coordonnées comobiles , émettant un photon à l’instant (voir Figure 6). Pour ce photon, voyageant à la vitesse de la lumière, dans la métrique FLRW on a, à tout instant:
car le long de sa géodésique θ et ϕ sont constants (). Posons l’instant de la réception de cette onde en . Alors grâce à l’équation précédente on a la relation :
avec pour en considérant un photon allant de la source vers l’observateur en 0.
Pour une onde électromagnétique de période , l’expression (38) étant valable à tout instant, on peut calculer la même intégrale pour l’onde émise à l’instant et reçue à l’instant (on suppose donc que la période va varier au cours du temps):
Par égalité des expressions (39) et (40), comme la période est petite devant les variations du facteur d’échelle pour les ondes électromagnétiques usuelles, on obtient:
Directement, si l’espace est en expansion alors et la longueur d’onde reçue est donc supérieure à la longueur d’onde émise . On définit alors le décalage spectral, communément appelé redshift en raison du fait que la quasi-totalité des spectres des galaxies observées sont décalées vers le rouge, par :
Le décalage spectral est à la fois directement lié au paramètre d’échelle , mais aussi à une grandeur expérimentale directement mesurable sur le spectre d’émission des objets distants. En effet, en regardant la position des raies d’absorption et d’émission des objets lointains, on peut en déduire leurs décalages spectraux par rapport aux mêmes éléments chimiques situés sur Terre, au repos. Cette donnée expérimentale est donc souvent associée à la définition des distances en cosmologie.
Solution to Exercise 1
6Distance propre et distance comobile¶
La distance propre définit la distance physique entre deux objets à un instant . Soit un objet émetteur situé aux coordonnées comobiles . Par définition, la distance propre entre cet objet et un observateur situé à l’origine est le long d’une courbe à θ et ϕ constants et vaut :
où on fait apparaître la distance comobile entre cet objet et l’observateur :
On voit que la distance propre possède bien l’unité d’une longueur alors que la distance comobile est sans dimension. Cette dernière représente la distance dans l’espace des coordonnées et est indépendante de l’expansion de l’Univers. En revanche la distance propre évolue dans le temps avec le facteur d’échelle.
Réciproquement, on définit ainsi :
Imaginons maintenant que cette distance puisse être perçue par le voyage d’un photon. La lumière voyage en suivant une géodésique, donc dans la métrique FLRW on a bien et :
Donc :
avec le photon voyageant le long de la direction pour . La distance comobile se réécrit :
Exprimons cette distance en fonction du redshift , qui, on le rappelle, est une observable expérimentale. Les intégrales peuvent se transformer entre les variables , grâce à la définition du taux d’expansion , et entre les variables et grâce à la définition du redshift :
D’où la distance comobile en terme de temps , facteur d’échelle et redshift :
On résume dans le tableau Table 3 comment se convertissent les paramètres , et à différents moments dans la chronologie de l’Univers.
Table 3:Conversion des paramètres , et . On note l’âge de l’Univers aujourd’hui.
a | t | z | |
---|---|---|---|
réception (aujourd’hui) | 0 | ||
émission (passé) | |||
début de l’Univers | 0 | 0 | |
fin des temps | -1 |
La distance propre est la distance que l’on pourrait mesurer effectivement à un instant entre deux objets. Si on choisit un objet situé à la coordonné comobile et un observateur comobile en 0, la distance propre aujourd’hui à s’écrit alors simplement pour les trois cas de courbure :
et s’exprime bien en unités de longueur. La notion de distance propre est illustrée Figure 7.
Figure 7:Distance propre entre la Terre et une galaxie lointaine sans vitesse propre apparente. (a) Aujourd’hui, la distance mesurée entre la Terre et cette galaxie est de années-lumière dans un espace plat. (b) A une autre date , cette distance évolue et vaut . (c) Distance propre dans un espace sphérique.
Solution to Exercise 2 #
- La coordonnée comobile χ est explicitement l’angle polaire entre l’observateur et la galaxie. La distance propre est la longueur de l’arc qui est comme dans la géométrie habituelle. La coordonnée σ est liée à la longueur de la corde à cet angle χ par :
Notons également que est le rayon du cercle de colatitude χ : .
- Avec la projection polaire Figure 8, on voit que θ est l’angle délimitant un arc de taille et de rayon , le rayon du cercle de latitude de χ. Ainsi :
Grâce au paramétrage , on voit que cette égalité fonctionne en espace plat et en espace courbe.
Si on préfère un raisonnement mathématique plutôt que graphique, en utilisant la métrique FLRW, nous pouvons démontrer également :
Donc on obtient de nouveau .
Il est facile de vérifier que nous avons les mêmes expressions dans le cas plat, et nous les admettrons dans la géométrie hyperbolique. La coordonnée σ est donc utile pour faire des calculs et des dessins dans le cas plat et traduire ces résultats dans les cas courbes (ce qui n’est pas si facile avec χ).
Figure 8:Géométrie dans un univers sphérique.
7Temps cosmique et temps conforme¶
Le temps mérite une mention spéciale. Dans notre Univers idéal, sans surdensités ou sous-densités de matière, toutes les horloges qui suivent l’expansion (c’est-à-dire sans mouvement propre) battent la seconde à la même cadence. Avec un temps infini à notre disposition pour mettre à l’heure toutes les horloges de l’Univers, nous pouvons proposer une convention universelle pour synchroniser nos horloges. Par exemple, lorsque la température du CMB atteint une valeur donnée, toutes les civilisations de l’Univers peuvent décider que cela correspond à une certaine date. Il est donc possible de définir un temps cosmique, commun à tous les observateurs comobiles Weinberg, 1972 [p. 409].
- Scrimgeour, M. I., Davis, T., Blake, C., James, J. B., Poole, G. B., Staveley-Smith, L., Brough, S., Colless, M., Contreras, C., Couch, W., Croom, S., Croton, D., Drinkwater, M. J., Forster, K., Gilbank, D., Gladders, M., Glazebrook, K., Jelliffe, B., Jurek, R. J., … Yee, H. K. C. (2012). The WiggleZ Dark Energy Survey: the transition to large-scale cosmic homogeneity. Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, 425(1), 116–134. 10.1111/j.1365-2966.2012.21402.x
- Mather, J. C., Fixsen, D. J., Shafer, R. A., Mosier, C., & Wilkinson, D. T. (1999). Calibrator Design for the COBE Far-Infrared Absolute Spectrophotometer (FIRAS). The Astrophysical Journal, 512(2), 511–520. 10.1086/306805
- The Planck Collaboration. (2013). Planck intermediate results. XIII. Constraints on peculiar velocities. Astronomy & Astrophysics, 561, A97. 10.1051/0004-6361/201321299
- Weinberg, S. (1972). Gravitation and cosmology: principles and applications of the general theory of relativity. http://www.lavoisier.fr/livre/notice.asp?ouvrage=1382255
- Baumann, D. (2022). Cosmology. Cambridge University Press. https://cmb.wintherscoming.no/pdfs/baumann.pdf
- Hobson, M. P., Efstathiou, G. P., & Lasenby, A. N. (2006). General Relativity: An Introduction for Physicists. Cambridge University Press. https://books.google.fr/books?id=5dryXCWR7EIC